Entretien avec Mehdi Bayat : L’EDJ, les abonnements, l’avenir
8 juin 2017
De l’importance de l’École des Jeunes et du Centre de Formation.
" Je pense qu’il faut rester lucide. Cette année, nous avons eu, une dizaine de départs sur 300 gamins. Finalement, le pourcentage est minime. Aujourd’hui, nous défendons une véritable philosophie au niveau du fonctionnement de notre centre de formation. J’ai été déçu au départ et j’en ai parlé à Alain DECUYPER, notre directeur Technique, qui avait le même sentiment que moi. En réalité, ce qu’il faut voir et constater, c’est que nous ne devons pas forcer un gamin à rester, on ne doit jamais contraindre quelqu’un à faire quelque chose contre sa volonté. Nous prônons une philosophie, des valeurs et nous tentons d’inculquer à nos jeunes et à nos enfants, des réalités d’une vie dans laquelle les valeurs doivent être plus importantes que l’aspect financier des choses. Nous les éduquons et nous essayons de leur faire comprendre qu’un bon ou un grand joueur de football ne doit pas seulement avoir du talent, mais il doit avoir aussi de la volonté, du travail, être perspicace, être capable de faire des sacrifices. Ce sont ces valeurs-là que nous voulons défendre. Si le garçon ne se sent pas bien par rapport à cette philosophie, s’il n’adhère pas à ce projet, et bien, il peut partir. Je ne ferai jamais, surtout dans ces tranches d’âge-là, une lutte financière pour garder un jeune, ce n’est pas dans notre système de fonctionnement.
Certains "Espoirs" sont partis alors qu’effectivement, ils avaient participé à des stages et des entraînements avec les "A". Dans ce cas de figure, nous ne devons pas avoir de regrets. Nous avons fait ce qu’il y avait à faire. Nous avons fait notre maximum, nous avons joué le jeu, nous avons respecté, nous avons transmis, nous avons donné. Cela ne se passe pas, et bien tant pis. Il ne faut pas avoir de regrets. C’est la vie. C’est le foot. On doit attribuer à cela, le fait qu’ils n’adhérent pas aux projets. Ils ont la volonté d’aller chercher quelque chose que nous ne pouvons leur donner… Et ils le regrettent, peut-être, à un certain moment. En général, quand des garçons partent, on ressent du regret, de l’amertume, mais c’est trop tard. Je le dis souvent, cela nous sert de "bons exemples".
Chaque année, nous allons tenter de donner la c.hance à l’un ou l’autre garçon de l’EDJ. Ils auront l’occasion de saisir cette aubaine. Ils saisissent ou pas, cette chance, tant mieux, ou tant pis. Ils iront peut-être dans d’autres équipes, de divisions inférieures ou pas, peu importe. Ils resteront, j’espère pour eux, dans le circuit du football. Nous aurons assumé notre responsabilité. Notre responsabilité n’est pas seulement de lancer des joueurs professionnels émanant de notre centre de formation, c’est aussi de lancer des joueurs qui seront soit pro ou semi-pro, soit des battants de bon niveau qui évolueront dans des équipes de la région et on l’assume avec un certain succès ; il suffit de regarder les équipes proches de Charleroi pour constater le nombre important de joueurs issus de notre EDJ. "
À propos des abonnements…
" Le prix des abonnements n’a pas augmenté, c’est déjà un élément important à souligner. Nous avons encore, un long travail qui nous attend : le potentiel est là, c’est indéniable, je n’ai aucun doute là-dessus. Nous devons continuer à travailler de manière à permettre pour certains de réaliser des sacrifices financiers. Il faut arriver avec cette pensée, que venir au stade, c’est incontournable. Je suis persuadé que dans le chef de certaines familles, l’aspect financier est un mur dressé qu’il est difficile d’escalader. Il faut se mettre parfois à la place des gens. Nous vivons dans une société où une majorité de la population, malheureusement, n’arrive pas à boucler les fins de mois. Cela veut dire, que lorsque vient le moment d’acquérir un abonnement, cela devient compliqué et difficile. Alors, ils se disent, on va faire "match par match". Ils savent que c’est plus cher, mais ils vont quand même le faire parce qu’ils n’ont pas les moyens de mettre en une fois, 150 € voir plus, pour un abonnement. Ils vont donc attendre et débourser une vingtaine d’euros, voir plus pour une rencontre de football, c’est comme cela, il faut l’accepter. C’est le cas pour beaucoup de nos supporters, pour qui, le Sporting est une priorité. Ils vont faire le sacrifice pour le Sporting et c’est pour cela qu’ils sont exigeants, qu’ils demandent à être compris, écoutés et pouvoir s’identifier dans le projet avec nos joueurs. Nous comprenons cet état d’âme. Nous devons continuer à travailler davantage afin que ces fans puissent s’identifier encore plus au point de faire passer le Sporting de Charleroi comme prioritaire chez eux. C’est comme cela. Quand on analyse les chiffres en BS, en VIP, nous affichons complets, pire, si l’on veut, on ne sait plus où les mettre. Cela veut dire, que c’est bien au niveau du "grand public" qu’il y a un incontestablement, un problème financier réel et pourtant, nos prix sont quasi les plus bas de Belgique. Nous devons donc, continuer à travailler pour attirer une nouvelle clientèle.
Il faut être réaliste, aujourd’hui, nous vivons une époque moderne, pas nécessairement bonne où le football "champagne" n’a plus sa place. Nous nous trouvons dans une ère de foot tactique, avec des entraîneurs "nouvelle vague" qui ont des visions bien différentes de ce qui se passaient il y a à peine quelques décennies. C’est une réalité. Je crois qu’il ne faut pas se positionner par rapport à cela. Je ne pense pas que les gens ne viennent plus au stade parce qu’il n’y a plus assez de spectacles. Le fait que nous avons eu, à maintes reprises, le bonheur de marquer dans les 15 dernières minutes de jeu, c’était presque jouissif. On a envie de revivre ces moments-là. Les gens apprécient aussi le suspense, le " jusqu’en boutisme". On trouvera, effectivement beaucoup d’excuses, pour moi, la première, c’est l’aspect financier et puis, plus spécifiquement à Charleroi, on doit redonner l’envie à un certain public, de revenir au stade. Le public nous suit dans la presse, sur les réseaux sociaux. Les audiences TV sont extraordinaires, celles de Charleroi sont parmi les meilleures de Belgique, cela prouve qu’un public nous suit et s’intéresse au club. À nous de les convaincre de revenir au stade.
Nous avons perdu probablement une voir deux générations de supporters à cause d’Abbas Bayat. Nous avons malheureusement perdu une grande partie d’un public qui aurait cru au projet au départ, et qui étaient les plus fervents. C’est clair, que cette période-là a eu un impact sur des générations de supporters."
L’avenir, c’est déjà demain.
" Il y a encore beaucoup de choses à faire. Les projets au niveau du club, sont loin d’être terminés. Nous devons stabiliser le club, nous devons être capables d’aller chercher un trophée, on doit terminer les travaux d’infrastructures du stade et ceux de Marcinelle, on doit finaliser l’organisation du centre de formation version professionnelle… Il y a encore tellement de choses à faire que c’est presque sans limite et quand nous aurons terminé tout cela, nous voudrons continuer à grandir. C’est un métier extrêmement compliqué et difficile parce que cela ne s’arrête jamais finalement, surtout pour nous, au niveau de la direction du club. Comme je le dis bien souvent, le club existera encore dans cent ans, que ce soit avec ou sans moi et mon équipe, nous sommes-là, finalement, pour marquer de notre empreinte, l’histoire du Sporting de Charleroi et j’espère que l’on se souviendra de nous dans les livres du club, un jour, comme une direction compétente et valable qui a fait son maximum pour faire de Charleroi, un grand club de football.
Nous avons conservé depuis cinq ans, la majorité de nos joueurs et ceux qui sont partis, ont bien été remplacés, nous avons conservé notre entraîneur qui va entamer sa cinquième saison avec le club de son cœur, nous avons titillé les grosses pointures du championnat et les POff1, ne sont plus pour nous un rêve inaccessible. Tout cela était écrit dans notre projet 3-6-9. Tout ce qui se passe et est appliqué au Sporting de Charleroi n’est jamais que le résultat de formules et d’un plan stratégique que nous avions mis en place à l’époque et que nous sommes en train d’appliquer. J’ai la chance d’avoir les bonnes personnes aux bons endroits qui adhérent, qui croient au projet et qui poussent pour faire grandir le club. Tout ce qui a été dit depuis septembre 2012, n’est jamais que la stricte application du projet 3-6-9. "